A mon signal, amène le dessert!
Ca roule plutôt bien pour moi depuis un moment, je ne me plains de rien. Je ne suis ni blessé ni meurtri, ce que j’ai me plait et je n’attends rien de particulier, ni sur le fond, ni sur la forme. Cinq heures de sport par semaine, un sain appétit pour les crudités à l’huile d’olive, et à défaut de les incarner, j’ai à l’esprit la jeunesse et la beauté et ça suffit à alléger mes pas. Côté filles c’est comme ça, quelques fois comme ci, mais le plus souvent comme ça. Comme cette histoire que j’ai eu l’année dernière. Elle s’appelait Nora et elle et moi avons eu beaucoup de joie et de plaisir à être ensemble. Je crois pouvoir dire que pendant six mois je n’ai vécu pour que pour elle, je ne sortais plus, ne voyais plus mes amis et ne lisais même plus –j’avais stoppé net au beau milieu de Lunar Park pour tout vous dire. Bon sang ce qu’elle était belle ! La vie a ses délices, quel ingrat serais-je pour en douter. Bien sûr aujourd’hui cette histoire comme beaucoup d'autres est finie, mais quoi, tout a une fin non ? C’est pas Françoise Sagan qui disait comme ça « benouiquoi, un jour on aime, pis un jour c’est fini, voilà quoi. » Elle disait ça avec le détachement qu’on lui connaissait, certainement d’ailleurs que c’était son truc à elle pour passer au travers des gouttes. Son détachement mondain a dû lui épargner beaucoup de souffrance, elle avait tout compris. Et d’ailleurs a-t-on d’autres choix ?
On connaît la question, Comment vivre sans souffrir ? On cherche tous la même pommade parce que pour ce qui est de souffrir, ça, tous autant que nous sommes on sait bien que..Mais passons. Nora est partie un matin après avoir fait le café et préparé une machine de linge (les draps du lit). Elle a passé sa main sur ma joue, doucement en souriant. « Tu te souviens qu’on s’était promis de ne jamais abuser l’autre ? ». Je m’en souvenais parfaitement. Ca faisait un mois que nous étions ensemble et nous étions saoul tous les deux après avoir passé une soirée radieuse, des instants de désirs et d'effleurements les yeux dans les yeux. Nora portait cette robe légère qui mettait autant en valeur ses jambes que son sourire et semblait me promettre le vent tiède de la nuit. Rentrés à l’appartement je l’avais littéralement plaquée contre la porte d’entrée à peine refermée pour l’embrasser à pleine bouche et visser mon bassin contre le sien. Elle avait stoppé mon élan, « attends » m’avait t-elle demandé dans un souffle, « promets-moi que si le feu s'éteint, si tu ne m’aimes plus tu me quitteras immédiatement et sans état d’âme. » Moi bien sûr j’avais trouvé ça tellement beau -et je bandais si fort - que je lui avais promis, évidemment Nora, compte sur moi, autant qu’elle m’avait adressé sa promesse en retour, elle me quitterait dès les premiers signes d’usure.
Quand elle est partie je suis resté attablé devant ma tasse de café à la regarder s’éloigner sa petite valise noire à la main, ouvrir puis refermer la porte d’entrée. Clac. Je me souviens que j’ai bu mon café froid en réalisant que j’étais resté une heure sans bouger la bouche ouverte et les yeux fixés sur la porte. Une heure. Je n’ai plus eu de nouvelles d’elle depuis et n‘ai pas cherché à en avoir, une promesse est une promesse. D’ailleurs quand je pense à elle, je la vois encore plus belle d’avoir tenue parole. Je l’imagine avec un autre type à qui elle doit tout donner comme elle l’a fait pour moi.
Voilà. Fin de l’histoire.
Ca va pas mal pour moi aujourd’hui comme je disais, ni blessé ni meurtri, la vie au fil des jours.
Du sport, une vie saine, des bouquins, je laisse venir.
J'écume
J'm’enrhume
Je n'ai qu'une idée
Eternuer
Te retourner le canoë
Etre le dernier
A s'éterniser sur ton corps alangui.
Alain Bashung - Jean Fauque / Alain Bashung